inondations de 1910

Les inondations de 1910 à Saint-germain-La-Ville par Alexandre Simonnet, Maire

Avant propos,

Le travail que je soumets à l’appréciation de mes lecteurs est établi dans le but de perpétuer le souvenir de l’année 1910 ; qui fût pour bien des régions et des pays une dévastation générale. L’année 1909 qui n’avait été qu’une année pluvieuse devait également en léguer à sa plus jeune, et dés les premiers jours de janvier jusqu’au 21, jour d’une crue subite de la Marne que rien ne faisait présager aussi impétueuse, il était inévitable que les eaux sauvages , dites de sources qui environnent Saint-Germain-la-Ville, surviennent aussi nous causer de l’inquiétude. Le résumé du fascicule que j’ai établi donnera à penser quelles heures d’angoisse nous avons passés, et que si devant le danger imminent qui menaçait les habitants de notre commune, il n’était pas de mon devoir de maire de prendre d’urgence toutes les dispositions nécessaires pour éviter un désastre et jeter la consternation parmi nous. Je n’ai pas voulu que ce souvenir néfaste soit oublié, et dans cette intention j’ai pris la liberté de narrer les événements tels qu’ils se sont passés, afin que si pareil malheur venait à arriver, ceux qui nous succéderons dans l’avenir puissent également s’éviter une catastrophe en voulant bien se guider sur les travaux que nous avons établis les 7 et 17 février 1910 afin de pouvoir sauver le pays de l’inondation en quelques heures. A. Simmonet

Les inondations de Saint-Germain-La-Ville en 1910

Pour celui qui a lu attentivement l’ouvrage publié par l’honorable M.Léon Collard, Maire de Saint-Germain-La-Ville, Conseiller d’Arrondissement, son attention a dû être attirée sur tous les chapitres intéressants que comporte cet ouvrage. Aujourd’hui ne voulant pas toutefois faire double emploi avec l’ouvrage publié, je crois néanmoins qu’il est de mon devoir d’attirer l’attention de nos concitoyens sur le chapitre V”Evènements malheureux , incendies, inondations, maladies épidermiques.” L’honorable M. Léon Collard relate que si la commune de Saint-Germain-La-Ville a largement payé sa dette à la Patrie, elle a eu à supporter beaucoup d’épreuves. Après les incendies de 1856 et 1857, l’inondation de 1872 et 1879. L’année 1872 fut une dévastation pour tous, et de mémoire d’homme, il fallait se rapporter aux années 1816 et 1844 pour faire semblable comparaison. Les années de désastre et de dévastation, que l’on croyait finies viennent cependant d’avoir leur nouvelle répercussion en 1910.

Après les pluies continuelles de l’hiver et pour une cause qu’il m’est impossible d’approfondir, le 21 janvier 1910, une crue subite et impétueuse vient envahir le territoire situé entre la Marne et le canal à une telle hauteur qu’il est à craindre pour le canal.

Les champs de blé et les prairie submergés, il n’en était pas assez, !!! car l’afflux d’eau persistant fait sortir les eaux sauvages, dites de source. Du 23 janvier au 5 février 1910, ces eaux, comme l’impétueuse Marne, veulent anéantir notre territoire ; chaque jour elles prennent des proportions inquiétantes, l’eau envahit dés le 27 janvier les habitations de M.M. Simonnet Alexandre, Maire – Peuchot – Choiset. Et, comme en 1872, viennent du levant, c’est-à-dire des bois La Guerrye,de la Barre et de Grosnay.

L’inquiétude règne dans notre paisible commune, chacun se demande ce qui va advenir, car de jour en jour l’eau continue à envahir les maisons, écuries, granges etc. Le spectacle, quoique n’étant pas aussi terrifiant que chez nos voisins de Juvigny, donne cependant à penser que des mesures urgentes doivent être prises.

De mon devoir de Maire, nous réunissons le Conseil Municipal d’urgence afin de statuer sur la situation qui est créée aux habitants de Saint-Germain-La-Ville, et à l’unanimité il est décidé qu’il faut prendre toutes dispositions nécessaires afin de pouvoir, si faire se peut, dégager les maisons, écuries et granges envahies par l’eau. Pouvoir est donné au Maire d’assurer l’exécution de cette délibération, si besoin est.

Voyant le danger imminent pour tous mes administrés désignés ci-dessus, le dimanche soir 6 février, constatant que ces eaux de source, au lieu de rester stationnaires menacent de faire bien des ravages et causer et la ruine et la dévastation, je n’ai qu’une résolution : celle de demander à M. le préfet de la Marne d’autoriser le droit de réquisition pour faire établir une tranchée à l’est du village afin de faire écouler les eaux des bois de la Barre et de la Guerrye. Dans ce sens voyant un danger imminent , un arrêté prévu par la loi du 24 Août 1790 est pris d’extrême urgence le 7 février à 6h1/2 du matin, et pendant que M. Emile Dommange , adjoint au maire parti pour Châlons faire toutes diligences avec la préfecture et les Services de la Navigation et du Service Vicinal, je reste sur les lieux pour préparer le travail, espérant sur la bienveillance des Pouvoirs Publics pour atténuer les effets d’une crue aussi forte. Dans l’attente d’une approbation, ayant reçu un téléphone vers 10 heures du matin de M. Dommange qui est à Châlons, que l’approbation ne pouvait être refusée, nous Simonnet Alexandre, Maire de Saint-Germain-la-Ville, de concert avec le Service de la Navigation, représenté par M. Jacquet Gustave, Garde de la Navigation et l’intérimaire éclusier M. Robin, aidés de M.M. Person fils maçon, Delavalle Jules, Rumé Hubert, Hacart Jules Garde Champêtre, Moret Philogène Cantonnier communal, il est procédé aux études de nivellement et de tracé de la tranchée à établir. Le travail de nivellement opéré par M.Gustave Jacquet donne un bon résultat, il accuse 0,60 m de pente et il est décidé qu’aussitôt l’approbation de l’arrêté, une tranchée sera au travers des champs et partant du chemin de grande communication N° 60,pour aboutir près de l’usine de M. Champagne, industriel, de façon à écouler les eaux en aval de cette usine et de gagner la Moivre.

Dans l’intervalle de ce travail, des dépêches et messages téléphoniques sont envoyés à chaque Chef de Service pour les aviser de la situation et les prier de nous prêter leur concours.

A 11 heures du matin, le 7 février 1910, en qualité de Maire, je reçois l’approbation de notre arrêté pris , comme il est dit ci-dessus , en vertu de la loi du 24 Août 1790. A midi, l’appariteur donne connaissance , à son de caisse, des mesures prises et en vertu de la délégation et du droit qui nous sont conférés, j’invite par réquisition tout homme valide à venir d’office prêter son concours pour établir la tranchée projetée. L’annonce faite dans les termes que nous signalons ci-dessus produit immédiatement ses effets et à 1 heure du soir, 150 hommes ont répondu à l’appel de réquisition, chacun armé d’une pioche, bêche ou pelle.

Pour activer le travail une charrue trace la tranchée d’une longueur de 150 m et derrière elle chacun, apporte son dévouement pour activer le travail. bien que triste le spectacle est imposant, car de l’avis de personnes étrangères à St Germain ,il est constaté que l’union et l’esprit de solidarité règnent parmi les habitants. Pendant les préliminaires du travail, les exprès et dépêches téléphoniques viennent nous assurer que chaque service s’intéresse à notre situation. A noter en premier lieu aussi, M. Brodier Chef Cantonnier à Pogny qui, malgré un travail de première urgence à opérer sur la chaussée de Vitry la ville, sur ordre de M. Schultz Conducteur est envoyé pour se tenir à notre disposition.

A 1h1/2 du soir il est fait un examen des lieux avec les services intéressés, et nous constatons que tout le monde est au travail ; chaque équipe ayant son poste à l’amont ou à l’aval du bois de la Barre nous demandons à M. Bertier Chef Cantonnier que pour faire évacuer l’eau de la source de Grosnay, il faudrait que le chemin de grande communication N° 60 soit coupé et pour ne pas interrompre la circulation, des tuyaux en béton seraient posés.

Il est 2 heures du soir a ce moment arrivent M. Fery Conducteur des ponts et chaussées délégué par M. l’ingénieur Lambert, Agent Wyer pour le service vicinal M. Laurens Conducteur des Ponts et Chaussées chargé du service de la navigation. Avec Messieurs les chefs de service nous procédons à une nouvelle visite des lieux et de la conférence à laquelle nous avons assisté , il est décidé d’activer le plus vite possible les travaux de terrassement et que le chemin de grande communication sera coupé aussitôt que possible. L’activité règne dans chaque chantier , et pendant ce temps une visite est également faite dans chaque maison sinistrée. l’eau est loin de diminuer, aussi est il décidé que les travaux ne seront pas interrompus, faudrait il même travailler de nuit.

Afin de conserver un souvenir inoubliable de ce sinistre, Monsieur Georges Thévenier vient vers 3 heures du soir, prendre des vues photographiques des chantiers : Nous le remercions bien sincèrement et nous sommes heureux qu’il ait bien voulu nous réserver un cliché de son travail.

4 h du soir. Le travail s’avance et la tranchée de 150 m va être bientôt terminée. Il ne reste plus que la traversée du chemin de grande communication . Avant de l’ouvrir, un travail de parachèvement se fait à l’aval de la Moivre; tandis qu’une équipe opère vers la source de la Barre. Une foule considérable venue de plusieurs points vient se rendre compte des travaux et se mêlant avec les habitants de Saint-Germain-la-Ville, donne à dire que chacun prend part à notre détresse.

Vers 4h 1/2 du soir, nous recevons la visite officielle de M.l’Ingénieur en Chef Sigault ( Service des routes et chemins) qui a voulu nous témoigner toute sa bienveillante attention en venant nous assurer du concours du service Vicinal pour essayer d’atténuer les effets de l’inondation. M.l’Ingénieur en Chef approuve notre façon de procéder et par ses conseils judicieux donne à chaque chef de service la mission qu’il a à remplir, après avoir visité le travail et les maisons inondées. L’eau semblant atteindre le maximum de sa hauteur vers 6h du soir un repère est placé près du chemin 60 sur le peuplier bordant ce chemin.

6 heures du soir. Les tranchées sont terminées, elles ont 0,60 à 0,70 m de profondeur et une largeur moyenne de 1,30 m. Le chemin de Marson au canal est coupé, des ponts provisoires sont établis. A ce moment, des terrassiers coupent la route de Saint-germain à Vésigneul, les maçons requis posent les tuyaux en béton et des barrières munies de lanternes sont établies pour indiquer le danger.

7 heures 30 du soir. Tous les travaux sont terminés, l’eau afflue dans les tuyaux et semble laisser prévoir qu’une baisse sensible sera marquante le lendemain. Néanmoins, vu le danger, nous réquisitionnons M. Hacart Jules, Garde Champêtre, de veiller à l’exécution de notre arrêté et qu’il fasse toute diligence pou éviter tout accident, en se faisant accompagner si besoin est afin de nous prévenir le plus vite possible.

10 heures du soir. Au lieu de diminuer, la crue tend à s’accentuer dans les habitations sinistrées, aussi est ce avec une véritable inquiétude que M. Simonnet, Maire, accompagné de M. Jacquet, Garde de la Navigation, Hacart Jules Garde Champêtre,accompagnés de plusieurs personnes qui veulent aussi prendre part à ce sinistre , vont constater l’état des lieux à l’amont et à l’aval des travaux établis durant la journée. Aucune baisse n’est constatée.

1 heure du matin. Nouvelle visite des lieux, une légère baisse de 0,01m est constatée, mais dans les maisons sinistrées, l’état est stationnaire. 3 heures1/2 du matin. 6 heures 1/2 du matin. Etat stationnaire. Dés le matin du 8 février des mesures nouvelles sont étudiées avec les agents du service vicinal et de la navigation et il est décidé qu’un nouvel appel de réquisition , d’un homme par maison sera fait pour établir une tranchée au Bois La Guerrye. Cette tranchée faite dés midi et celle de la veille que l’on élargit afin de lui donner plus d’écoulement ne semble pas encore laisser dire que l’on soulage les sinistrés. Ce jour qui est pourtant le Mardi-gras et devrait plutôt être un jour de fête est bien un jour de détresse. Sur tous les visages la détresse se lit, on craint et l’on se demande ce qui va advenir si la situation ne s’améliore pas.

Bien que chacun soit ennuyé, le découragement ne s’empare pas des esprits, et après une consultation faite avec le Service Vicinal et de la Navigation et aussi crainte que l’inquiétude ne gagne davantage les habitants qui subissent les effets de l’inondation, à 5 heures du soir, il est décidé qu’une nouvelle tranchée sera établie au travers du chemin de grande communication N° 60, à l’est du village près de celle établie la veille. Pour cela un message téléphonique est adressé à M. l’Ingénieur des Ponts et Chaussées Lambert à Châlons pour lui demander l’autorisation et l’assurer que toutes les mesures de précaution seront bien prises afin de ne pas entraver la circulation des voitures.

A 7 heures du soir, l’autorisation nous est donnée par M.l’Ingénieur Lambert, mais vu l’heure tardive les travaux ne seront entrepris que le lendemain matin. 11 heures du soir. Les eaux continuent à monter et il est à craindre que dans les écuries, notamment chez M. Simonnet Maire, ……… on ne soit obligé de faire évacuer les chevaux. Dans les granges, cours, caves, l’eau afflue de plus en plus, les puits sont débordés, et encore chez M. Simonnet, pour traverser sa cour et pénétrer dans ses dépendances, il faut s’y rendre en passant sur des ponts mobiles faits de madriers. Une excavation s’est produite près du puits et ce ne sera que lorsque les eaux seront baissées que l’on pourra juger de son importante. Néanmoins des mesures de précaution sont prises et une permanence est établie pour faire des rondes ou tournées de nuit.

Après une nuit de veille, le 9 février, il est procédé à l’établissement de cette nouvelle tranchée au travers du chemin de grande communication . Elle a 1,5m de largeur et au lieu de tuyaux en béton, elle est recouverte par des traverses de chêne, mises à la disposition du service par la Société de Tir.

Cette nouvelle tentative pour assurer plus de dégagement aux eaux paraît devoir donner satisfaction et à midi , il est constaté une baisse de 0,04 m au repère établi le 7 février sur le peuplier longeant le chemin 60. Dans les dépendances inondées, la baisse s’effectue également, mais elle est lente ; cependant elle donne lieu de penser qu’elle continuera et que le maximum est atteint. A 6 heures du soir, la baisse s’accentue de toutes parts et après des heures d’angoisse e calme et la confiance renaissent et les habitants vont quelques instants prendre un repos bien mérité. Le 10 février au matin, l’eau se retire lentement, mais toute crainte doit être dissipée, les habitations et dépendances inondées conservent le niveau d’eau stationnaire.

L’épreuve subie par la commune de Saint-Germain-la-Ville restera présente à toutes les mémoires et chacun s’accorde à dire que cette crue sur des eaux sauvages dépasse celle subie en 1872. De nombreux visiteurs venus des pays environnants viennent chaque jour se rendre compte de la situation, et unanimement disent bien haut que l’on avait pas vu chose semblable depuis un temps immémorial. Bien des personnes aussi , voyant le danger que couraient les habitants de la commune ont été également unanimes pour féliciter tous les travailleurs de toutes catégories qui se sont joints à M. le Maire de Saint Germain afin de paralyser la crue et d’avoir aussi spontanément fait de si utiles travaux afin de ne pas inonder la plus grande partie du village. De tels encouragements valent la rémunération du travail, car si en qualité de maire, je suis resté sur la brèche, sacrifié mon temps et négligé mes intérêts personnels, je dois déclarer hautement que tous mes administrés ont rempli leur devoir avec un dévouement digne d’éloges, et à tous sans distinction, je leur adresse ici l’expression de mes remerciements les plus chaleureux. Je manquerai à mon devoir si je n’adressais pas mes plus vifs et sincères sentiments de reconnaissance à M.M. les Ingénieurs et Conducteurs des Services Vicinal et de la Navigation, qui par leur haute compétence ont été pour nous de bons conseils, exécutés à la lettre par M. Jacquet Gustave Garde de la Navigation, M. Brodier Jules Chef Cantonnier et les autres agents subalternes qui les ont secondés. A ces derniers, tous mes remerciements en mon nom personnel et u nom des habitants de Saint Germain.

Le résumé de cette triste période devrait s’arrêter là mais malheureusement les pluies continuelles nous donneront une seconde fois une alerte qui prend de sérieuses conséquences. Dés le 15 au soir, l’eau redevient aussi impétueuse. Les sources de Grosnay et des bois La Guerrye augmentent de plus en plus ; la tranchée faite à l’est du village n’est pas suffisante pur assurer le débit d’eau qui afflue d’heure en heure. Les maisons, cours, granges dont le niveau d’eau restait stationnaire depuis quelques jours sont aujourd’hui submergées davantage. Au nord de saint Germain la Ville l’eau envahit les maisons et les granges et les habitants pour une seconde fois sont de nouveau dans la détresse.

Ayant fait appel de nouveau au concours du service des Ponts et Chaussées par M . Brodier Chef Cantonnier délégué par M. Schultz Conducteur, nous nous sommes rendu compte en commun de l’état des lieux. Nous avons constaté que le nivellement fait le 7 février pouvait peut être être erroné, bien que notre conviction restait telle, et que l’afflux d’eau ne pouvait provenir que des deux sources de Grosnay et des bois La Guerrye se combattant entre elles. Afin de pouvoir enrayer cette nouvelle crue, nous demandons à M. Lambert Ingénieur à Châlons , de vouloir bien, si possible mettre à notre disposition un agent de son service qui de visu se rendra compte de notre situation et nous donnera toutes les indications nécessaires afin d’évacuer les eaux dans un sens ou dans l’autre.

Le 16 février au matin, déférant à notre invitation, M. l’Ingénieur délègue M. Noël, Conducteur des Ponts et Chaussées chargé du service hydraulique, pour se rendre compte de l’état des lieux, et étudier les moyens propices pour aboutir à la solution la plus favorable dans les intérêts des habitants sinistrés. A la suite de la conférence que nous avons ; lui avoir exposé nos propositions d’établir une tranchée partant du bois La Guerrye pour aboutir au bois de la Fosse à L’Orme après avoir traversé le chemin de Grande Communication N° 60 vers Chepy, nous nous rendons sur les lieux pour procéder à un minutieux nivellement. Les études sont faites consciencieusement . M. le Conducteur Noël, tout en partageant notre avis , demande d’étudier à fond le travail qu’il vient de faire sur le terrain, et nous donne rendez-vous pour le lendemain matin 17 février. Les eaux de Grosnay venant se combattre avec celles des bois La Guerrye , il est reconnu qu’il sera nécessaire de faire une tranchée au travers du chemin de l’Epine allant du village à la route nationale N°4 près de la maison ” Cabinet”.

Le résultat des opérations et du travail fait par M. le Conducteur Noël ne pouvant être que favorable à nos avis communs, pour la seconde fois nous réquisitionnons à son de caisse tous les hommes valides d’avoir à se rendre le lendemain 17 à 7heures du matin avec pelle, pioche et bêche pour établir une nouvelle tranchée au nord du village. 17 février . A 7 heures du matin, 150 hommes sont sur le chantier ; le tracé de la tranchée fait la veille permet de commencer le travail. Comme la première fois la charrue est employée pour activer la besogne. C’est M…. qui effectue ce travail. M. le Conducteur Noël est sur les lieux et nous communique le résultat de ses études. Conformément aux prévisions que nous émettions chacun , la veille, l’évacuation des eaux ne peut se faire que suivant le premier nivellement fait le 7 février et ratifié d’une façon exacte le 16, c’est-à-dire d’envoyer les eaux de Grosnay et des bois La Guerrye vers Chepy au lieu dit la fosse à l’Orme. La tranchée part des bois La Guerrye en suivant le chemin de desserte sur environ 150m, puis de ce point elle longe le chemin de grande communication N°60 sur une longueur de 250m et de là elle coupe ce chemin , aboutissant à la Fosse à l’Orme ; sa longueur totale est d’environ 400m sur1m, 1,20m de largeur, suivant le nivellement fait d’une profondeur de 0,60mà 0,90m. Sans récrimination, le travail s’opère ,et sous notre surveillance ainsi que celle du Cantonnier Communal Moret Philogène et du Garde Champêtre Hacart Jules, nous pouvons espérer que ce travail donnera toute satisfaction et soulagera d’une façon efficace les habitations et dépendances sinistrées.

11 heures du matin. M. le Conducteur Noël ainsi que M. Brodier Chef Cantonnier nous accompagnent pour faire une visite générale des lieux sinistrés et des travaux qui ont été établis précédemment . L’avis favorable qu’ils émettent nous donne à penser que cette crise est terminée et que les travaux que nous exécutons aujourd’hui mettront un terme à toutes les transes et inquiétudes que nous avons subies depuis 15 jours. Avec M. Brodier Chef Cantonnier, nous restons en permanence sur le chantier et pendant les travaux de terrassement M.M. Person père et fils , sur les indications données par le service vicinal, posent les tuyaux de 0m30 au travers du chemin de l’Epine et du chemin de grande communication N° 60 lieu dit la Fosse à l’Orme. A 6 heures du soir, les travaux ne sont pas encore terminés malgré toute activité, mais tout le monde promet de revenir le lendemain matin. Le niveau de l’eau constaté , accuse une légère hausse, mais cependant personne ne s’en inquiète , car demain la décrue sera sensible.

18 février 7 heures du matin. Les terrassements sont repris , le personnel de la veille est le même et chacun s’accorde à dire qu’il faut terminer le plus vite possible. 11heures 1/2 du matin. Les barrages qui étaient établis de part et d’autre pour ne pas entraver le travail sont rompus et l’eau ayant son écoulement normal, vient se jeter dans le bois de la Fosse à l’orme. 2 heures du soir. La situation devient bonne, en peu de temps il est accusé une descente de 0,m06 et pour le soir il est à présager que tout danger sera complètement disparu. 5 heures du soir. Le travail terminé de tous côtés donne pleine et entière satisfaction, le niveau d’eau des habitations submergées commence à redevenir à un état étale qui fait présumer pour le lendemain que cette fois tout danger sera conjuré. 19 février. Dés le matin, nous parcourons les maisons et dépendances envahies par l’inondation et à l’avantage de tous, la baisse s’accentue rapidement. L’eau s’écoule normalement dans les tranchées amont et aval du village et nous constatons que si le temps semble se mettre au sec , dans quelques jours l’état normal de notre paisible commune sera rétabli. 23 février. Nos prévisions sont réalisées, l’eau diminue de plus en plus, et c’est le cœur soulagé que nous constatons la gaieté revenir parmi nos administrés.

Observations. Je n’ai pas lieu de penser que pareil événement se renouvellera , mais cependant les générations qui voudraient prêter attention à ce modeste fascicule, trouveront les explications nécessaires pour agir de suite , en se guidant sur les données du dit fascicule , et sur le terrain, en se rapportant aux aqueducs en tuyaux posés sur chaque chemin qui était soit envahi par l’eau , ou qu’il était nécessaire de traverser pour éviter le désastre et la ruine de Saint-Germain-la-Ville.

Conclusions.. Je ne voudrais pas terminer ce petit exposé sans une dernière fois adresser mon tribut de reconnaissance à tous ceux qui ont concouru aux travaux de protection de l’inondation de Saint-Germain-la-Ville ; inondation causée par les eaux sauvages des bois La Guerrye, Grosnay et La Barre. J’ai reconnu que tous , sans parti pris, nous avons donné un exemple de solidarité et que sans récriminations l’entrain et le dévouement n’ont cessé de régner dés le premier appel de réquisition. Je suis heureux de pouvoir témoigner bien haut ma plus sincère reconnaissance et mes remerciements les plus vifs à tous ceux qui ont apporté le zèle et le dévouement dans cette pénible circonstance. Nous conservons tous présent à la mémoire ce triste souvenir et tous comme moi aussi, vous vous rappellerez ce travail, qui en quelques heures a permis d’éviter une catastrophe dont les effets ne pouvaient être prévus. Une fois encore à M.. les Ingénieurs, Conducteurs des Ponts et Chaussées, ainsi qu’à M. Noël dont le concours nous a été une précieuse utilité je n’ai plus qu’un mot pour leur dire : Merci de nous avoir aidés pour mener à bonne fin tous nos travaux. A leurs précieux auxiliaires, Chef Cantonnier, Garde de la Navigation et agents inférieurs ainsi qu’à nos employés de la voirie municipale, Garde Hacart et Cantonnier Moret, je leur dis également merci en les assurant tous que la Commune de Saint-germain-la-ville saura garder bon souvenir de leur précieux concours.